FRANÇAIS
Pourquoi un plan d’investissement national
pour financer les besoins émergents
africains d’ici à l’an 2030 ?
pour financer les besoins émergents
africains d’ici à l’an 2030 ?
La réponse de
l'Université des Connaissances Africaines en 7 points
1. Pourquoi
d’ici à l’an 2030 ?
Plusieurs raisons militent
pour que la France s’engage dans un plan d’investissement industriel national
en Afrique. Je ne pourrai pas les citer toutes ici, de fait, j’en ai
sélectionné 5 pour les besoins de cet article et une bonne compréhension de ma
réflexion.
La première raison
pour nos investisseurs est économique. Il est communément reconnu que l’Afrique
est un continent qui regorge de richesses. Cependant, force est de reconnaître
également que ces dernières sont encore très peu diversifiées et n’offrent que
peu de valeur ajoutée. Dans ce sens en effet, le continent en général et les
économies de la zone franc pour ne parler que de notre zone de confort
économique, comptent avant tout sur les richesses de leur sous-sol, notamment,
le pétrole, le gaz naturel et les minerais. Ces marchés sont extrêmement
porteurs et cette année encore, ils sont soutenus par une croissance mondiale
estimée à 3,4% par le FMI, le double en Chine et en Inde qui sont leurs
principaux clients. L’Afrique s’affirme donc comme une zone à fort potentiel
économique car celle-ci a la capacité de générer de la croissance comme il
n’est plus possible ailleurs dans le monde.
La crise actuelle comme
deuxième opportunité d’investissement. Face à la baisse du prix du pétrole et du gaz,
un certain nombre de pays subsahariens connaissent une crise. Or plutôt que
d’être fataliste, cette crise doit nous amener à réfléchir sur de nouvelles
opportunités d’investissement. Investir en Afrique subsaharienne n’est pas sans
risque et nous le savons tous. Des cadres doivent encore être définis, achevés
que ce soit le secteur financier qui est encore en chantier, le contrôle du
mouvement des capitaux, l’économie fermée et encore largement nationalisée, le
faible tissu industriel, les liquidités rarement garanties et une démocratie
fragile. De nombreuses barrières doivent être levées, afin que la zone franc se
transforme en terre d’accueil des capitaux étrangers. Cependant, malgré leurs
difficultés, notre expérience africaine révèle que des pays aussi différents
les uns des autres ont tout à fait les capacités pour se faire une place de
choix dans l’économie mondiale.
La troisième raison est
en lien avec les infrastructures. L’Afrique est selon Alexandre VILGRAIN,
Président du Conseil français des Investisseurs en Afrique dans l’édito de la lettre
du CIAN de juin 2017 :
« L’Afrique est le plus grand marché du monde pour les infrastructures à
construire, et ceci pour longtemps… ». Ce futur eldorado des
investisseurs fait face à des besoins de financement colossaux. L’atteinte des
objectifs de développement et la lutte contre la pauvreté vont demander de
mobiliser entre 600 à 1 200 milliards de dollars par an (1 089
milliards d’euros) selon la CNUCED, dont 93 milliards au moins pour les seules
infrastructures. Or, soyons réaliste ni les seules ressources budgétaires des
gouvernements, ni l’aide au développement fournie par les pays donateurs ne
suffiront à couvrir ces besoins. Bien au contraire, crise oblige, celle-ci a
plutôt tendance à baisser. Il nous faut donc trouver de nouvelles sources de financement
indispensables au développement du
continent africain et ce sans retomber dans le piège infernal du
surendettement. S’agissant des infrastructures, ces dernières s’inscrivent
avant tout dans un impératif moral car elles permettent notamment de pouvoir
garantir l’accès à un certain nombre de besoins primaires et d’apporter des
services de base comme l’eau et l’électricité (chacun sait que les taux d’accès
en Afrique sont encore très faibles : 29 % pour l’électricité, soit 600
millions d’habitants qui en sont privés, et seulement 65 % pour une ressource
aussi vitale que l’eau). Mais au-delà et en faisant de la prospective, la mise
en place d’infrastructures, c’est aussi répondre à une impérieuse nécessité
économique. En effet, c’est en intégrant l’Afrique aux chaines de valeur
internationales que nos dirigeants pourront réaliser la promesse de
l’industrialisation, base d’une croissance inclusive et transformative. L’Afrique
doit tirer ses propres leçons et pour attirer les usines qui feront sa richesse demain, elle
doit faire face à ses obligations de compétitivité.
La quatrième raison est
culturelle : L’Afrique est le deuxième continent d’expatriation française
devant les Etats-Unis d’Amérique. Nous commettons tous l’erreur culturelle qui
consiste à penser que le fait d’avoir en commun dans l’espace culturel
francophone le français veut que dire tout va de soi et que les
« africains » connaissent les français et vice-versa. Malheureusement,
cette situation est source de plus en plus de malentendus culturels. La vérité
est qu’avec les nouvelles générations, les liens entre les cultures se distendent
et l’Africain de 2017 n’apprécie pas ce qui se passe dans son pays et à
tendance à faire porter à la France la responsabilité d’une partie de ses
souffrances. Cette mauvaise image dont souffre la France actuellement participe
aussi à ses pertes de parts de marchés sur le continent. Il en découle un
problème de fluidité dans les rapports et décisions, d’asymétrie
informationnelle.
Acteurs économiques et politiques français : que vous
reproche votre partenaire culturel africain sur ses terres en 2017 ?
L’absence d’un processus collectif de décision conjointe
suite à une :
- Gestion malhabile du passif
historique,
- Haute idée de la France qui biaise
la réflexion stratégique,
- Réticence à l’ouverture vers
l’Autre malgré les incantations,
- Incapacité à prendre en compte les
particularismes locaux qui s’aggravent et se complexifient avec la
mondialisation,
- Impairs et négligences des facteurs
culturels,
- Faible capacité de prise en compte
des besoins émergents des populations africaines à savoir la satisfaction
des sept faims.
Les cadres et dirigeants
africains exigent de plus en plus des décisions négociées qui après analyse des
complexités à gérer, éléments fournis ou en discussion, doivent porter sur :
- La nature des problèmes à résoudre
(mauvaise question, solution inadaptée),
- Le type de solutions disponibles
dans une logique d’offre de solutions économiques et non d’aide bilatérale
ou multilatérale,
- Le type d’acteurs qui participent à
la préparation de la décision (manque de culture des acteurs, de
connaissances et de repères historiques et de compétences
interculturelles),
- Le type d‘acteurs qui appliquent la
décision,
- La division du travail en vigueur
dans le processus décisionnel et la conduite des missions,
- Les procédures qui gouvernent les
tâches des uns et des autres,
- Les circuits d’information
disponibles, les circuits actuels souffrent de la stratégie française de
diffusion-rétention de l’information stratégique,
- La rigidité du contexte
organisationnel à laquelle vous, en tant que décideur, êtes confrontée,
- L’ambiguïté des missions et des actions (le manque de clarté, de précision, de moyens, de logistique et de simplicité sont souvent pointés du doigt).
Il va donc s’agir de faire
des décisions françaises, une démarche collective jalonnées de décisions
négociées, elles-mêmes articulées par processus décisionnels normatifs… Cela
permet, dans le cadre des rapports franco-africains, une concertation
appropriée à des situations en pays réel que ni le droit légal (pays légal), ni
la simple démocratie incantatoire ne peuvent initier.
Le
manque de revitalisation de l’intelligence interculturelle française dans une
zone franc mondialisée.
Rien ne sert de courtiser
les pays africains anglophones, si l’on n’est pas en mesure de générer une
prospérité économique dans sa zone de confort économique. Quel exemple de
réussite proposé pour convaincre ces derniers de nous suivre ? En 2017, la
guerre économique s’intensifie et la mondialisation de l’Afrique se poursuit,
mais les acteurs changent, les intérêts et l’écriture de l’histoire aussi. Nous
lisons, depuis plus d’une décennie, dans les rapports à diffusion restreinte,
que ce sont des Etats qui expriment de mieux en mieux, les intérêts de leur
population contre la logique des marchés et là encore dans ces changements qui
se sont amorcés, ce sont surtout les peuples d’Afrique francophone qui viennent
rappeler aux investisseurs français, leur différence culturelle et leurs
nouvelles exigences et attentes, en scandant les slogans suivants :
- Modernité avec nos traditions,
- Ouverture aux autres avec nos
identités recomposées,
- Des projets avec nos mémoires et
respect des intérêts mutuels bien compris,
- Démocratie et mutualisation des
intérêts multiformes et multidimensionnelles coproduction, copartage,
codéveloppement durable.
La
dernière raison relève du constat : la France est en train de manquer le
bateau de la croissance du continent africain
Ce constat a été relevé à
plusieurs reprises et ce que ce soit par des officiels africains ou des
représentants français : "Nos partenaires traditionnels comme la
France (...) pourraient avoir à travailler un peu plus dur pour nous convaincre
de travailler avec eux dans les investissements menés sur le continent", a
souligné lors d'un forum franco-africain à Paris la ministre des Finances du
Nigeria, Ngozi Okonjo-Iweala. "Ceux
qui ne sont pas encore sur le terrain doivent commencer maintenant. Parce que,
croyez-moi, si vous manquez le bateau, si vous n'êtes pas en Afrique
maintenant, vous allez rater l'occasion de toute une vie", a-t-elle
ajouté, sous les applaudissements de quelque 560 entrepreneurs africains et
français. L'ancienne haute responsable de la Banque mondiale a martelé qu'il
était "temps pour le secteur privé
français de venir".
"L'Afrique
est éveillée et nous devons nous réveiller", a
admis la ministre française du Commerce extérieur, Nicole Bricq. "Notre part de marché diminue nettement dans
les pays d'Afrique francophone, où elle a été divisée par deux en 20 ans,
passant de 31% à 13% en Côte d’Ivoire ou encore de 36% à 14% au Cameroun par
exemple", a-t-elle déploré. "Et, en parallèle, nos parts de marché
dans les pays africains anglophones peinent à décoller". Au Nigeria,
pays le plus peuplé d'Afrique, cette part n'est que de 3,6%, a-t-elle noté. Ce
chiffre est de 8,2% pour les Etats-Unis, 4,3% pour le Royaume Uni et 18,5% pour
la Chine, selon le Direction générale du Trésor. Reconnaissant la perte de
parts de marchés de la France, le président, François Hollande, a annoncé comme
objectif de doubler les échanges avec l'Afrique "dans les deux sens, exportations et importations".
2.
Pourquoi un plan d’investissement national pour financer les besoins émergents
africains ?
L’Afrique francophone a été
pendant longtemps considérée comme son « pré carré » par la France.
Or aujourd’hui, du fait de la mondialisation notamment les rapports de force
ont changé et de nouveaux partenaires économiques se sont présentés pour ces
pays d’Afrique faisant ainsi rentrer la concurrence internationale dans les
partenariats.
De
la perte des parts de marché à un déclassement progressif de la France
Deuxième région du monde
derrière l’Asie en termes de croissance du PIB durant la décennie 2000,
l’Afrique émerge aujourd’hui comme l’un des moteurs de l’économie mondiale.
Cette émergence, elle la doit avant tout à elle-même. Loin des clichés véhiculés,
le continent a connu depuis plus de dix ans une croissance endogène, tirée par
la consommation d’une classe moyenne en cours de développement et déjà forte de
120 millions d’habitants, au pouvoir d’achat stable. De plus, le dynamisme africain
n’est nullement restreint aux seuls pays exportateurs de matières premières.
Les indicateurs montrent que la croissance des économies africaines n’est pas
un épiphénomène limité sur la durée mais une tendance structurelle et durable. Dès
lors si malgré la francophonie, sans oublier cette présence militaire sans
équivalent, les risques d'un déclassement progressif de la France en Afrique
n'étaient finalement pas si négligeables ? « Les Africains diversifient leurs
partenariats, il est normal que nos positions relatives s'érodent car nous
étions parfois en situation de monopole ».
La
lente agonie du système d’influence et de rayonnement français
La France subit en Afrique
une mondialisation qu’elle n’a pas orchestrée, et le nouveau contexte mondial
remet en question les paradigmes qui ont fondé les relations France-Afrique
francophone. Elle éprouve donc de plus en plus de difficultés à assembler, maintenir
son périmètre de puissance de manière cohérente et satisfaisante. En Afrique
francophone, depuis la fin de la guerre froide, lentement et progressivement
s'est installée une crise d'influence et de rayonnement dans l'État franco-africain. Cette crise
marginale au début, devient de plus en plus profonde et manifeste, tant au
niveau des exécutifs africains, qu'au niveau des peuples d'Afrique francophone.
Elle s'appelle la crise du temps
français qui se traduit par une baisse d’influence française en Afrique et
un emballement de la contestation de la légitimité historique française dans sa
zone de confort économique.
En effet, à la base de tout
système d’influence, il y a une expertise rare et recherchée qui produit un
rapport de force inégal. Or, quand cette expertise devient obsolète et qu’une
absence de revitalisation de la pensée stratégique ne permet plus de maintenir
l’enthousiasme conquérant des entrepreneurs, acteurs sociaux et politiques, le
rapport de force s’inverse et le système s’effondre de lui-même. C’est dans ce
contexte que la réponse endogène contre le système d’influence et de
rayonnement apparaît au grand jour.
Repenser
le business model national pour l'Afrique francophone
Le modèle économique actuel
de la décision publique est caractérisé par la modestie des investissements. Cela
se retrouve à titre d’exemple dans le désengagement de plus en plus marqué
depuis les décennies 1990 de la puissance publique dans les politiques suivies.
Il en découle la question de
l'efficience de ce modèle économique de la décision publique d’une part et sa
capacité à intégrer l’ensemble des externalités africaines d’autre part, ainsi
que les développements endogènes qui y sont liés. Cela pose alors ici la
problématique de l’intelligence économique française, de sa diplomatie
économique mais aussi la question de la revitalisation de notre ingénierie
financière en Afrique de 2017 à 2025.
De plus, le modèle
économique post-colonial qui sous-tend les processus économiques de rente et de
coopération n’a permis de favoriser ni de véritables transferts de compétences,
ni la construction d’autonomies authentiques et pertinentes. Bien au contraire,
cela a permis de favoriser voire de maintenir une demande toujours renouvelée
d’assistance, en lieu et place de l’émergence de véritables partenariats.
3.
Que faire ensemble à présent ?
La
France est un partenaire pour l’Afrique et elle doit jouer sa partition et donc
se positionner dans cette offre de codéveloppement, de co-production.
Toutefois, pour ce faire, il lui faut répondre à deux urgences essentiellement.
Première
urgence : faire face à l'obsolescence créative
L'accélération de la
concurrence des émergents, a eu l’effet d’un réactif dans un laboratoire, et a
permis de mettre en lumière les retards français dans la course au maintien de
son leadership. Cette obsolescence créative s’est traduite au niveau des
entreprises et entrepreneurs par une perte de l'enthousiasme conquérant des
secteurs privés et publics français. Cette absence de dynamisme nous empêche de
renouveler notre offre de codéveloppement économique avec nos partenaires
africains qui naturellement vont rechercher de nouvelles ressources vers d’autres
propositions de codéveloppement plus avantageuses face à leurs impératifs. S’il
faut le relever, il est malheureusement à noter que dans les vingt pays les
plus pauvres au monde, onze sur dix-sept ont toujours été en Afrique
francophone et cela quel que soit les études menées (OCDE, PNUD, Doing
Business, Banque Mondiale…).
Par ailleurs, cette perte trouve
aussi une explication dans le rapport à l’autre que nous avions développé, qui
lui-même s’exprime et se traduit dans les relations économiques, par des
propositions axées autour des stratégies économiques de rente (extraction des
matières premières et gestion des intérêts en lien, préservation contre toute
logique économique quelques fois des privilèges et intérêts) et dans une
logique de rente. Cette logique rentière a eu un effet dévastateur et a fait
perdre au génie français en Afrique son enthousiasme conquérant, le goût du
risque, l’innovation créative et le cantonne au réductionnisme technologique
tant dans les transferts que dans les coopérations.
Pour illustrer mon propos, je
prendrai l’exemple du Nigéria qui s'est tourné vers la Chine pour disposer de
son premier satellite avec un service après-vente intégré. Sur ce point précis,
force est de constater s’agissant de la zone francophone, que sur l’ensemble
des pays d’Afrique francophones réunis (UEMOA et CEMAC), aucun ne dispose, 57
ans après les indépendances, de satellite tant individuellement que
collectivement alors que la France est l’un des leaders européens du secteur.
Deuxième
urgence : la revitalisation de l’intelligence interculturelle française
Face aux émergents et aux
légitimes aspirations de bien-être des peuples africains mais aussi pour
conserver la chaîne de valeur française, il est temps de prendre définitivement
conscience du caractère peu performant des paradigmes postcoloniaux en Afrique.
Cette prise de conscience a non seulement le mérite de nous renvoyer face aux
réalités mais elle nous oblige surtout à proposer à la fois aux élites
françaises et africaines une nouvelle façon de penser, de se réinventer dans la
relation franco-africaine et afro-française. En d'autres termes, il s’agit là
de réussir à épouser de manière pragmatique et non émotionnelle, les nouvelles
courbes africaines et les contingences françaises. Réinventer en situation,
veut dire que les solutions proposées actuellement ou le bouillonnement observé
par-ci par-là (CIAN, MEDEF, CCIP, MAE,
GPEME) sur la mosaïque des opportunités commerciales que présente l’Afrique
actuellement, ne sont que des continuités de paradigmes anciens et non le
bénéfice d'une revitalisation de la pensée franco-africaine et afro-française,
intégrant l'urgence des temps (politique, économique, militaire, religieux,
culturel...) et des mutations continues dans le contexte où elles se
développent.
L'obligation d'une
revitalisation de l'intelligence interculturelle franco-africaine et
afro-française, doit se traduire par :
- Un
plan national d’investissement industriel française en Afrique francophone ;
- Une
densification de l'offre française de codéveloppement économique,
(délocalisation industrielle, cocréation de nouvelles entités de
productions locales, transfert de basses et moyennes technologies, cocréation
des champions nationaux locaux, etc…) ;
- Une
massification des points de convergence d'intérêts et de mutualisation des
compétences afro-français dans toute la chaîne de production des
connaissances et des valeurs par un programme national des coformations.
La France a, par rapport aux
économies africaines en phase de pré-industrialisation et en industrialisation,
un handicap dû à son développement et à la structure même de son économie :
elle propose aux États africains, une offre performante et de haute technologie
pas toujours adaptée à la demande de basses et moyennes technologies des
économies africaines. A elle seule, la maîtrise du savoir-faire technique n’est
plus suffisante pour emporter la décision sur des marchés complexes où une
multitude de paramètre entre en ligne de compte. Les entrepreneurs français
doivent s’adapter aux exigences du marché, savoir écouter les desiderata des
prospects et ne peut négliger la dynamique interculturelle déjà évoquée. La
crise économique actuelle ainsi que l’exacerbation de la concurrence des
émergents et le nouveau système de besoins et attentes des pays africains vont
créer un processus de sélection naturelle. Il en ressort que les entreprises
qui parviendront à suivre et à absorber la charge des émergents et des
exigences locales devront trouver de nouveaux relais de croissance (hors
pétrole et matières premières) donc fonctionner différemment. Il s’agit de
proposer aux acteurs économiques locaux des réponses faciles et des solutions
peu onéreuses à mettre en œuvre. Les émergents en Afrique ont fait preuve de
simplification, de persuasion et même d’influence en s’appuyant sur des offres
adaptées et conformes aux besoins des clients finaux avec pragmatisme, avec des
solutions financières permettant de parer aux plus urgents.
4. Comment
financer ?
Intégration de l'offre française dans
les économies africaines et non addition
Dans le scénario
investissement massif pour le développement industriel des économies de la zone
franc, les pays africains, attendent et réclament des délocalisations pour
organiser le transfert de technologies et une réelle prise en main de
l’émergence économique.
La France a-t-elle la volonté manifeste de dépasser le
réductionnisme technologique ?
Les pays africains mettent l’accent non sur
l’accumulation quantitative de technologies, mais sur leur intégration dans une
approche globale - qualifiée d’holistique – du développement et de la
planification économique à long terme. Ces pays n’ont pas la technologie, mais
ont une vision stratégique et politique du développement économique. C’est une
approche classique des stratégies de rattrapage technologique qui fait du retard
un avantage, comme l’a théorisé Alexander Gerschenkron dans son
ouvrage de 1962[i]. Ces pays peuvent marier une
technologie traditionnelle qu’ils commencent à maîtriser et rechercher les
synergies avec une technologie nouvelle importée. L’archétype de ces stratégies de rattrapage à long terme est la
stratégie chinoise qui est en train de passer du « made in China » au «
innovated in China »[ii] de plus en plus tirée par le
marché intérieur.
Il est plus qu'urgent dans une logique d'offre de
codéveloppement économique, de co-production, des compétences, de connaissance
et d'information, que la France propose des offres globales pragmatiques, c'est
à dire, une offre intégrée et non des réponses françaises aux besoins africains
par bloc et selon les besoins stratégiques français. Face à la concurrence des
émergents et des besoins légitimes pour leur émergence, les pays
africains francophones attendent une réponse économique systémique française,
axée autour de l’intégration économique. Il est intéressant de noter que, pour
la première fois, les peuples africains vont demander aux acteurs économiques
français, de s'intégrer dans leurs attentes. Un nouveau rapport de partenariat
où les africains formulent leur stratégie d’émergence en termes de
développement à long terme et pas seulement en termes de débouchés commerciaux
comme le fait la France.
Cette stratégie est cohérente avec l’état de l’art de
l’économie de l’innovation : le capital matériel est mobile – donc copiable -
tandis que les actifs immatériels (la connaissance, le savoir-faire, le
capital social) sont enracinés dans un territoire et peu mobiles, donc
devant être reproduits de manière endogène, par apprentissage, à partir des
spécificités historiques du capital social du territoire. Les compétences sont
de nature idiosyncratique, c’est-à-dire qu’elles sont propres à un contexte,
voire une organisation, et difficilement déployables dans un autre. On peut
copier une technologie, pas une compétence. Celle-ci doit se recréer en
contexte par un long processus d’apprentissage endogène au pays et au
territoire d’accueil. Elle dépend d’une culture technologique qui est elle-même
fonction d’un capital social.
On comprend donc aisément qu’aujourd’hui, il nous faut
à tous penser intégration économique afro-française et non préservation des
intérêts français en Afrique. Il faut pour cela partir des usages, des besoins,
des attentes, des demandes, et non pas d'une stratégie mercantile qui se bornerait à ne voir l'Afrique que comme un
marché d'écoulement de produits français.
Intégrer les deux approches
L’Université des Connaissances Africaines riche de sa
longue expérience franco-africaine, propose une intégration des deux approches
africaine et française en associant les entreprises, les universités et la
volonté politique.
Pour
cela, nos experts travaillent à une gestion de la densité, tant des offres que
des politiques. Il nous faut remastériser la carte-mère culturelle,
économique voire individuelle française. Les pays d’Afrique francophone ont de
manière certes incohérente, une stratégie basée sur l’intégration des
technologies existantes qu’ils peuvent se procurer dans les pays
industrialisés, tandis que ceux-ci en général et la France en particulier ont
des stratégies basées sur l’exportation. D’un côté des stratégies intégratives
à moyen terme des pays africains qui dominent la demande dans l’espace
francophone africain, de l’autre côté des stratégies addititives à court terme
des entreprises françaises qui dominent l’offre.
Nous élaborons la proposition d’un cadre de référence
commun basé sur le développement de la modélisation
systémique qui permettrait de rééquilibrer cette inversion probable de
leadership dans 30 ans au profit des pays africains.
En conclusion, comment définir le
schéma d'organisation de l'offre systémique de codéveloppement économique
afro-française et franco-africaine ?
Du point de vue français
- Cartographier les intégrations françaises
aux économies émergentes africaines ;
- Définir un business model national pour
l'Afrique francophone intégrant les systèmes de besoins et attentes des
pays et marchés cibles ;
- Établir des méta-règles de conception de
la démarche française et africaine
- Mettre en place une charte nationale de
fonctionnement, d'organisation et de travail dans les rapports économique
entre la France et les pays africains ;
Du point de vue Africain (par pays et organisation sous régionale UMOA et CEMAC)
1. Recevoir des
pays africains, de manière individuelle, un business model national qui intègre
le système de besoins et d'attentes français
2. Établir des
méta-règles de conception de la démarche africaine par pays et organisation sous-régional
3. Mettre en
place une charte nationale de fonctionnement, d'organisation et de travail dans
les rapports économique entre le pays africain et la France
5.
Quand ?
La reconversion industrielle est une
démarche opérationnelle dont l’analyse des prérequis et des conditions de
faisabilité auront lieu dans les Etats clients dès janvier 2018.
6.
Avec quoi ?
LA
NATIONALE STRATÉGIQUE dans ses domaines d’expertise, doit être en capacité de
répondre avec diligence à toute commande passée par le Président de la
République, le Premier Ministre, qu’il s’agisse d’éclairer l’avenir, de
contribuer aux choix de politiques publiques, de réaliser les projets,
d’organiser des concertations ou d’évaluer des dispositifs et des politiques.
Elle est chargée de coordonner un
réseau de 8 programmes d’Etat mis en œuvre par des structures
désignées sous le vocable d’agences :
• Agence Nationale Stratégie et Défense,
• Agence pour la reconversion industrielle nationale,
• Agence Nationale de Sécurité Economique,
• Agence Nationale de l’Economie de la connaissance,
• Agence Nationale de la Prospective,
• Agence Nationale de Management et gestion des crises,
• Agence Nationale du numérique,
• Le Programme de Formation métiers MAYELE.
7 - Avec qui ?
LA NS
s’exécute et s’articule en mode management de projet, c’est-à-dire
constitution de groupes pluridisciplinaires, ou comité interministériel
devant travailler sur un même projet, selon un budget défini dont les
livrables (les rendez-vous sur
objectifs) sont rendus dans les délais compressés.
Publié
par Patrice PASSY, Président de l’Université des Connaissances Africaines